Nos pratiques culturelles pendant le confinement

Bilan de l’évolution de nos pratiques culturelles pendant le confinement. Cinémas, théâtres et concerts interdits, il a fallu modifier ses habitudes pour consommer la culture autrement, en restant chez soi.

Aurions-nous survécu au confinement sans la culture ?


Le 17 mars 2020, la France entière se confinait en même temps pour ralentir la pandémie de Covid 19. Pendant 2 mois, nos pratiques culturelles ont subi de radicales évolutions. Confinés, l’accès aux cinémas, aux théâtres, aux concerts, aux musées ou aux festivals nous était désormais impossible. Pourtant, la culture nous a accompagné pendant tout le confinement.

La télévision a ressorti ses tiroirs des vacances

A mesure que le confinement devient de plus en plus réel, le marché publicitaire s’effondre. Parallèlement à ça, tous les tournages s’arrêtent et on ne sait pas encore pour combien de temps. Face à ces pertes et cette incertitude, la télévision arrête la diffusion de séries phares inédites, remonte en urgence des émissions à gros succès telles que Koh Lanta ou The Voice pour prolonger leur durée de vie en prime. Cas de force majeur oblige, il faut bien combler les heures d’antenne à moindre rentabilité publicitaire.

Le confinement aura eu de positif qu’il nous aura donné un avant-goût d’été dans le programme télé. Pendant les vacances estivales, les audiences sont bien plus faibles et les chaînes ressortent allègrement tous les films indémodables dont elles ont les droits de diffusion.

Cette année, c’est en mars que TF1 s’est lancé dans la saga Harry Potter et que W9 a sorti la saga Twilight de ses tiroirs. Avec France Télévisions nous vivions le confinement avec Louis de Funès et Jean Rochefort. Le service public nous a offert tout une collection de grands classiques tous publics pour combler ses heures d’antenne et ses téléspectateurs en même temps.

Car oui, ces films multi rediffusés ont toujours leur petit succès, à fortiori quand on est obligé de rester chez soi. La télévision reste souvent un réflexe.

Les musées ont offert des visites virtuelles

Comme tous les lieux accueillant du public sans être de première nécessité, les musées ont été obligés de fermer leurs portes. À défaut de remplir leurs salles d’exposition, beaucoup d’entre eux ont proposé des visites virtuelles. De quoi à la fois proposer des moments culturels aux confinés et capitaliser sur cette fermeture par la communication. Ma petite expo virtuelle préférée et toujours en ligne, l’exposition Harry Potter, Une histoire de la magie de la British Library, mise en ligne en 6 langues par Google Arts et Culture.

Les podcasts ont eu leur heure de gloire

Le podcast a connu une forte progression pendant le confinement. L’audio digital a séduit. La radio est généralement très écoutée en voiture. Sans ces trajets, l’audience réduit inévitablement. Les programmes ont d’ailleurs été bouleversés par mesures sanitaires dans les studios et pour davantage coller à l’actualité.

Les podcasts peuvent, eux, être suivis n’importe quand et n’importe où (chez soi en l’occurrence…) ce qui en facilite l’écoute. On a vu fleurir de nombreux articles nous proposant le top des podcasts à suivre pendant le confinement. J’ai suivi la liste du Huffington Post et réécouté à des heures plus ou moins nocturnes que l’heure de diffusion les Lumières dans le nuit d’Edouard Baer. Le podcast a l’avantage de la VOD, sans image.

Si bien qu’il a fallu mesurer la croissance de ces nouvelles audiences. C’est justement ce qu’ont fait les deux start-up AudiOn et Happydemics. Dans leur étude, on apprend notamment que 46% des français ont écouté plus de podcasts pendant le confinement qu’avant. Visiblement, le format podcast a séduit pendant cette crise sanitaire. En un mois de confinement, plus de 4% de la population a adhéré au format, soit plus que la croissance annuelle habituelle.

Mais qu’allons-nous garder de nos nouvelles habitudes après l’été ?

Netflix & chill n’a jamais eu autant le vent en poupe

Les cinémas à l’arrêt, les plateformes de VOD ont accueilli à bras ouverts les amateurs du 7ème art. Netflix forcément, mais pas que. Amazon Prime, OCS mais aussi de façon exceptionnelle des sites de distributeurs, qui ont mis quelques œuvres de leur catalogue en ligne.

Les films qui devaient sortir le mercredi après le confinement ont dû tout annuler du jour au lendemain, perdant des semaines de promotion. Une exception à noter, le film Forte avec Melha Bedia et Michèle Laroque s’évitera le report en sortant directement sur Amazon Prime en plein confinement.

Les films sortis la semaine d’avant ont été tout autant stoppés net. La plupart sont ressortis à la réouverture des cinémas, mais nous sommes loin de l’effervescence. Les blockbusters américains adeptes de sorties internationales simultanées semblent attendre un peu plus de certitude sur l’avenir pour se relancer. Le cinéma français est presque tout aussi frileux. La peur du flop règne. En cause, la crainte que les spectateurs ne soient pas assez en confiance pour se rendre au cinéma, et probablement la peur d’un reconfinement.

Des films dont la sortie était prévue qu’en fin d’été, tels que Kaamelott pourtant très attendu, ont même annoncé leur report pour la fin d’année pendant le confinement à cause de cette incertitude. Malgré tout, peu d’innovation en matière digitale pour le cinéma, si ce n’est que les Oscars ont d’ores et déjà annoncé autoriser les films sortis directement en VOD à concourir en 2021.

Le rideau du théâtre est tombé

Même si des pièces ayant eu la chance d’être captées ont pu être partagées à la télévision ou par voie numérique, les représentations ont de particulier le contact avec le public et la reprise sera forcément à vitesse modérée. Le Festival d’Avignon, grand évènement annuel de théâtre ayant lieu chaque année en juillet a été annulé pendant le confinement. Difficile ici d’intégrer le digital sur scène.

Philippe Torreton a lancé une initiative pour offrir une place de théâtre à une personne de son entourage, lorsqu’on ne souhaite pas encore y aller soi-même par peur pour sa santé, en échange d’un résumé. Le but : relancer l’économie du spectacle et faire découvrir le théâtre à un public peut-être moins initié. L’idée est brillante, alors pourquoi ne pas en faire une plateforme digitale ?

Un été sans festival en France

L’été, c’est la saison de tous les festivals. Cette année sera forcément radicalement différente des précédentes et peut-être des prochaines.

Personne n’aura monté les marches de Cannes cette année. Nous n’irons pas écouter de la musique en plein-air dans les multiples festivals de l’été. Nous n’irons pas de théâtre en théâtre à Avignon.

Mais nous consommerons toujours de la culture. Différemment et peut-être avec un peu plus de numérique que d’ordinaire.

Et si cette crise sanitaire avait modifié nos habitudes de consommation culturelle en profondeur ?